Qui peut rester insensible ?

« Qui peut rester insensible à l’extrême misère de ceux qu’on appelle les « 4 Mi » ?
 
N’ayant plus rien, n’étant plus rien, ces malheureux errent dans la ville en attendant d’y mourir de faim ou de maladie.
 
Comme beaucoup d’autres, j’ai refusé d’accepter l’idée qu’ils étaient définitivement perdus, que l’espoir leur était interdit.
 
Depuis le début de l’année 1989, avec quelques volontaires, nous sommes allés parler avec eux dans les rues d’Antananarivo et à Ambohimahitsy, où certains étaient parqués à proximité d’une décharge municipale.
 
Ils m’ont raconté leurs vies, leurs souffrances, et aussi leur volonté de s’en sortir s’ils se sentaient soutenus de la manière appropriée.
 
M’appuyant sur la Providence de Dieu, c’est en les respectant, et en les aimant, que j’ai commencé un long travail de conscientisation, pour qu’ils recouvrent peu à peu leur dignité d’êtres humains.
 
Ce travail a porté ses fruits : en novembre 1989, nous avons pu créer un premier centre de ré-installation définitive où 70 familles de 4 Mi ont construit leurs maisons et se sont remises au travail de la terre. C’est le centre d’Antolojanahary, qui s’étend sur 140 hectares.
 
Pour développer ces activités, je me suis entouré de jeunes universitaires, ainsi que de religieuses, et j’ai fondé l’Association humanitaire Akamasoa en janvier 1990. Son but : mettre en œuvre un devoir de solidarité pour apporter l’aide morale et matérielle nécessaire à la réhabilitation des 4 Mi, à leur ré-installation et à leur ré- insertion sociale. En 1990, nous avons développé le centre d’Antolojanahary, nous avons transformé le mouroir d’Ambohimahitsy en centre d’accueil décent, et nous avons créé un nouveau centre de réinstallation à Ambatobe. Merci à tous ceux et à toutes celles qui nous ont soutenus. Rien de tout cela n’aurait été possible sans leur collaboration, sans la participation des autorités locales, des institutions internationales et des organisations caritatives.
 
Au total, ce sont 330 familles que nous avons prises en charge, afin de les accompagner sur le difficile chemin du retour à la dignité humaine. Ces 1 400 hommes, femmes et enfants ont fait preuve d’un courage exemplaire dans des conditions parfois dramatiques.
 
Est-ce suffisant ? Pouvons-nous à présent nous reposer sur nos lauriers en nous félicitant du devoir accompli ?
 
Non, il est humainement impossible d’arrêter maintenant. Car ceux qui ont repris pied ont encore besoin de nous. Nous ne pouvons pas les abandonner. Et d’autre nous appellent au secours. Nous ne pouvons pas les ignorer. Quels que soient les difficultés ou les moments de découragement, nous resterons à leurs côtés, forts des victoires déjà remportées sur la misère et sur la déchéance.
 
Ce dossier décrit nos objectifs pour les deux années à venir.
 
Plaise à Dieu et aux hommes de bonne volonté que nous trouvions les moyens de les mener à bien. »